Sila ville est éminemment connue pour son fameux vase, elle est moins comme destination week-end ! Pourtant, il existe au moins 3 bonnes raisons de s'y rendre. Je vous dévoile tout ici ! Voir plus. glose.fr. à 1 heure de Paris, un week-end culturel à Soissons. Le temps d'un week-end, je vous propose de visiter Soissons, surnommée « la cité du Vase ». Qui ne connaßt pas le
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Elleest surnommĂ©e "la citĂ© du Vase" et Ă raison puisquâelle est la fameuse citĂ© mentionnĂ©e dans lâanecdote historique lĂ©gendaire du vase de Soissons. Le vase Ă©tait un objet religieux restituĂ© par Clovis, Ă un Ă©vĂȘque chrĂ©tien qui lui en avait fait la demande. Il faisait partie du butin amassĂ© en 486 aprĂšs la chute de l'empereur romain Syagrius. Cette restitution allait Ă l
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PlustĂŽt ou plus tard, vous aurez besoin dâaide pour rĂ©ussir ce jeu stimulant et notre site Web est lĂ pour vous fournir des CodyCross Ville surnommĂ©e la âCitĂ© du Vaseâ rĂ©ponses et dâautres informations utiles comme des astuces, des solutions et des astuces. Ce jeu est fait par le dĂ©veloppeur Fanatee Inc, qui sauf CodyCross a aussi dâautres jeux merveilleux et dĂ©routants.Mame-Fatou Niang â â Lâarticle de Mame-Fatou Nian au format PDF En 1967, lâarchitecte Ămile Aillaud dĂ©voile les plans de la Grande Borne, un grand ensemble de prĂšs de 4000 logements Ă Grigny, commune semi-rurale Ă 25 kilomĂštres de Paris1. RĂ©solument utopiste, Aillaud imagine une architecture insolite qui rompt avec la verticalitĂ© et la grisaille des banlieues dâalors. SurnommĂ©e la CitĂ© des Enfants », la Grande Borne est un assortiment Ă©laborĂ© de bĂątiments bas et colorĂ©s qui serpentent entre des cours et coursives aux formes fantasques. Aillaud crĂ©e une suite dâĂźlots et dâimpasses aux noms Ă©vocateurs DĂ©dale, Minotaure, Astrolabe etc. Les nombreux passages et replis de lâespace sont conçus comme des lieux qui encouragent le jeu, la dĂ©ambulation et lâexploration de la mĂ©lancolie. Pour lâarchitecte, les circonvolutions de la citĂ© crĂ©ent des niches propices Ă lâintrospection et au dĂ©veloppement de relations de voisinages Ă lâĂ©chelle dâaffinitĂ©s humaines »2. Cinquante ans plus tard, le rĂȘve dâĂmile Aillaud semble sâĂȘtre effritĂ©, et la citĂ© de la Grande Borne sâest embourbĂ©e dans la mythologie urbaine française3. Elle y rejoint des territoires tels que le Mas du Taureau Ă Vaulx-en-Velin, ou la CitĂ© des 4000 Ă La Courneuve, territoires dont la seule Ă©vocation mobilise un rĂ©seau dâimages allant de la violence endĂ©mique Ă lâinvasion religieuse. La citĂ© est rivĂ©e au centre dâune gĂ©ographie de la peur nourrie par les reprĂ©sentations mĂ©diatiques et lâĂ©chec Ă rĂ©pĂ©tition des politiques de la ville. Ces reprĂ©sentations atteignent leur apogĂ©e en janvier 2015, lorsquâune France sous le choc dĂ©couvre le visage de lâun de ces enfants dâAillaud », Amedy Coulibaly, nĂ© Ă la Grande Borne et auteur des tueries des 8 et 9 janvier Ă Montrouge et Paris. Cet article se propose de sonder lâidentitĂ© et les rĂ©alitĂ©s de la Grande Borne aujourdâhui, en analysant lâaction des mouvements Ălan Citoyen » et Reporter Citoyen », deux collectifs qui se sont manifestĂ©s au lendemain des attaques de janvier 2015. Loin des rĂȘves dâAillaud, du prisme mĂ©diatique et des reprĂ©sentations extĂ©rieures, il sâagira dâanalyser, au travers des actions de ces groupes dâhabitants, lâempreinte que des Grignois veulent apposer sur la dĂ©finition de leur environnement. Dans lâimaginaire collectif, la Grande Borne aura Ă©tĂ© tour Ă tour la CitĂ© pas comme les autres, » la CitĂ© des Enfants », un haut-lieu de rĂšglements de compte entre gangs, le temple du trafic de stupĂ©fiants en ĂleâdeâFrance, et aujourdâhui, le berceau du tueur de lâHyper Casher ». Comment les habitants peuvent-ils redĂ©finir lâimage dâun espace tenaillĂ© entre cette multitude de dĂ©finitions et de reprĂ©sentations ? Quels sont les Ă©chos de telles initiatives citoyennes dans les perceptions de la Grande Borne ? En quoi ces initiatives permettent-elles Ă des Grignois de se rĂ©approprier le discours sur leur espace, et de devenir enfin producteurs de sens, artisans de leurs identitĂ©s ? â Un paradis pour enfants En 1968, Ămile Aillaud publie une tribune dans les Cahiers de lâInstitut dâAmĂ©nagement et dâUrbanisme de la RĂ©gion Parisienne. Dans la communication intitulĂ©e Quâest-ce quâune ville ? », lâarchitecte Ă©crit Devant le rĂ©sultat catastrophique des grands ensembles, on concĂšde parfois que lâurbanisme a Ă©voluĂ©, que cela se passait il y a dix ans. Non, ces formes urbaines ne sont pas maintenant dĂ©passĂ©es, elles ont toujours Ă©tĂ© une erreur. Avec une efficacitĂ© diabolique et une certaine simplicitĂ© dâesprit, les architectes ont fait dĂ©railler le monde ; et les enquĂȘteurs, sociologues ou autres, constatent le mal mais comme il nâest pas de leur domaine dâinventer une autre forme pour des citĂ©s, ils attribuent la maladie moderne de lâisolement » et la dĂ©personnalisation » Ă des causes variĂ©es, sans se dire que la forme » offerte actuellement Ă la vie urbaine nâĂ©tait pas fatale, quâune toute autre conception de la ville Ă©tait possible, qui peut-ĂȘtre aurait Ă©tĂ© moins pernicieuse. Aillaud, 1968 En France, la construction dans les annĂ©es 1950 de grands ensembles dâhabitation Ă lâorĂ©e des mĂ©tropoles laisse une empreinte dans le bĂ©ton dâune foi inĂ©branlable en un mieux pour lâHomme. Ces logements collectifs Ă loyer modĂ©rĂ© et disposant de tous les agrĂ©ments de la vie moderne sont considĂ©rĂ©s Ă leur dĂ©but comme une Ă©tape transitoire avant lâaccession Ă la propriĂ©tĂ© individuelle. Pourtant, lâon constate trĂšs vite les limites de politiques de lâhabitat qui ont nĂ©gligĂ© le caractĂšre essentiel de la ville [consistant] Ă rendre possible la vie en commun » Aillaud, 1968. Lorsquâil dessine les plans de la Grande Borne, Aillaud imagine une citĂ© qui rompt avec les lignes droites des grands ensembles traditionnels. Les pouvoirs publics lui confient 90 hectares de terrains agricoles enserrĂ©s entre la RN445, la RD310 et lâ A6 dans lâEssonne. En 4 ans, lâarchitecte y Ă©rige prĂšs de 3 500 logements qui accueilleront plus de 13 000 habitants de 27 nationalitĂ©s diffĂ©rentes4. La citĂ© est un labyrinthe de sept quartiers aux immeubles colorĂ©s et bas qui serpentent entre ruelles et espaces verts. Aillaud se dit habitĂ© par lâobsession de faire sortir de terre un espace de vie oĂč se mĂȘlent fonctionnalitĂ© et art, mais surtout un espace de rĂȘve et de dĂ©veloppement personnel pour ses jeunes habitants. âââ 1. Un dimanche aprĂšs midi Ă la Grande Borne Jean-François NoĂ«l 1973 â Les dĂ©buts dâune utopie Dans lâĂ©mission La France dĂ©figurĂ©e », Ămile Aillaud prĂ©sente quelques unes des idĂ©es qui ont sous-tendu la crĂ©ation de la Grande Borne, une citĂ© oĂč les enfants sont rois »5. Lâarchitecte confie vouloir rompre avec la monotonie des quartiers ternes, et crĂ©er un projet colorĂ© qui mĂȘle poĂ©sie, architecture et humanisme. Lâhabitat ne doit pas ĂȘtre conditionnĂ© par les seuls impĂ©ratifs de fonctionnalitĂ©s et de coĂ»ts, mais bien par le dĂ©sir dâoffrir un cadre de vie qui soit agrĂ©able, insolite et qui invite Ă repenser la modĂ©lisation des grands ensembles. Aillaud insiste sur sa dĂ©cision de ne pas faire de lâarchitecture, mais plutĂŽt une non-architecture qui soit au service du vivant. Dans cette optique, il dĂ©fend lâidĂ©e dâun bonheur et dâun ravissement original Ă portĂ©e de truelle. Pour Aillaud Lâhorreur de lâurbanisme actuel, câest de rendre tous semblables les gens dans ces bĂątiments unanimes et qui supposent une vie unanime, inexistante. [Ce systĂšme] crĂ©e de fausses collectivitĂ©s, [lĂ ] il faudrait quâon crĂ©e des singularitĂ©s, des possibilitĂ©s dâisolation, des possibilitĂ©s dâindividualisation. La seule dignitĂ© que lâon puisse offrir Ă des gens dĂ©munis par ailleurs, câest aussi dâĂȘtre des individus » Aillaud, 1968. Lâarchitecte dĂ©plore lâuniformisation des modĂšles, lâeffacement des aspĂ©ritĂ©s qui plongent lâindividu dans un monde aseptisĂ© et sans attaches. Le projet architectural dâAillaud se distingue par la singularitĂ© quâil veut offrir aux corps dans ces nouveaux espaces. Les habitants ne sont pas apprĂ©hendĂ©s comme un groupe uniforme assignĂ© Ă un lieu, mais bien comme une somme dâindividus autour desquels la citĂ© est pensĂ©e dĂšs sa conception. Aillaud opte pour une architecture minĂ©rale, avec des compositions aux couleurs vives et aux structures labyrinthiques qui rappellent un madrĂ©pore. ââ- 2. Ă gauche un madrĂ©pore ; Ă droite vue aĂ©rienne de la Grande Borne Banque des Savoirs Essonne, 1990 Ămile Aillaud imagine une suite de bĂątiments et de jardins repliĂ©s sur eux-mĂȘmes, qui favorisent le dĂ©veloppement de relations de voisinage Ă lâĂ©chelle dâaffinitĂ©s humaines » Aillaud, 1972. Il place lâenfance au cĆur de sa crĂ©ation en imaginant des espaces oĂč foisonnent terrains de jeux, refuges et Ćuvres dâarts. Aillaud explique cette fixation sur lâenfant, en rĂ©pĂ©tant Ă la suite de Freud que lâenfant est le pĂšre de lâhomme ». En agissant sur lâenfant, il espĂšre que ce dernier puisse ĂȘtre autre quâil aurait Ă©tĂ© sâil avait Ă©tĂ© ailleurs, quâil puisse devenir un individu ». La citĂ© regorge dâendroits pour les jeux de groupe, mais Aillaud imagine aussi une foule de refuges et dâabris propices Ă lâisolation, Ă la mĂ©ditation et Ă la recherche de soi. En octobre 2003, Jean-François NoĂ«l, photographe et ancien habitant de la Grande Borne, dĂ©voile une sĂ©rie de photos prises 30 ans plus tĂŽt dans la citĂ©. Ces clichĂ©s montrent un espace libĂ©rĂ© de lâemprise de lâautomobile et envahi par des enfants jouant sous les pigeons de la place de Treille, autour du Gulliver ensablĂ© de la Place de lâĆuf, ou sur le Serpent des Radars. âââ 3. Un dimanche aprĂšs midi Ă la Grande Borne Jean-François NoĂ«l, 1973 â OĂč la rĂ©alitĂ© rattrape lâutopie En visite Ă la Grande Borne en 1972, Ămile Aillaud confie sa joie de voir la rĂ©alisation sur le terrain de son rĂȘve poĂ©tique. La ville est un coquillage lovĂ© sur lui-mĂȘme, un immense terrain de jeu oĂč il est ravi de voir les enfants utiliser le matĂ©riel urbain exactement comme il lâavait prĂ©vu. Lâarchitecte se satisfait dâavoir créé un lieu de vie et dâĂ©panouissement oĂč toutes les composantes sont pensĂ©es en amont pour une utilisation spĂ©cifique. Trente ans plus tard, force est de constater lâĂ©chec du projet dâAillaud. DĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1980, soit 10 ans aprĂšs lâarrivĂ©e des premiers locataires, la Grande Borne sâimpose comme lâun des symboles des banlieues Ă problĂšmes, une aire de confinement et un contre-monde de la mobilitĂ© » Lapeyronnie, 1999 57. Espace clos enfermĂ© sur lui-mĂȘme, terrain vague pour vague Ă lâĂąme . Maspero, 1990 24 la citĂ© est Ă mille lieues de la boĂźte Ă rĂȘver dâĂmile Aillaud. Cet espace, jadis modĂšle, est devenu un lieu lĂ©gendaire [âŠ] sans cesse montrĂ© et parlĂ© sur le modĂšle de la contre-exemplaritĂ© » Milliot, 2003 123. Son Ă©vocation Ă©veille une multitude dâimages et de stĂ©rĂ©otypes, et les Ă©chos dâincivilitĂ©s relayĂ©s par les mĂ©dias ont contribuĂ© Ă cristalliser dans les imaginaires lâidĂ©e dâune zone de non-droit, dâun lieu du ban. Dans le cas prĂ©cis de la Grande borne, une combinaison de facteurs exogĂšnes et dâĂ©lĂ©ments spĂ©cifiques Ă lâhistoire, au terrain et Ă la genĂšse de ce projet, ont contribuĂ© Ă cet Ă©chec rapide. Il conviendra de relever ici, entre autres, lâabsence de concertations entre les diffĂ©rents acteurs du projet, le cloisonnement spatial et le manque dâĂ©quipement publics tels que les Ă©coles, les crĂšches et les bibliothĂšques, les problĂšmes structuraux nĂ©s des malfaçons du bĂąti, les effets de la crise Ă©conomique des annĂ©es 1970 et enfin, la concentration exponentielle de populations prĂ©caires et dâorigines Ă©trangĂšres. Bien avant le premier coup de crayon dâĂmile Aillaud, le projet de la Grande Borne semble compromis par lâabsence manifeste de concertations entre deux de ses principaux acteurs, les pouvoirs publics et la municipalitĂ© de Grigny. AprĂšs la fin de la Seconde Guerre mondiale, lâĂtat cherche Ă rĂ©gler la crise fonciĂšre qui est une consĂ©quence du conflit et de lâexpansion rapide de Paris. En 1965, il jette son dĂ©volu sur une immense plaine agricole Ă cheval entre les communes de Grigny et Viry-ChĂątillon. Le permis de construire du grand ensemble de la Grande Borne est dĂ©livrĂ© le 10 octobre 1967, et la maĂźtrise dâouvrage est confiĂ©e Ă lâOffice public HLM interdĂ©partemental de la rĂ©gion parisienne OPDHLMIRP. Les travaux sont rĂ©alisĂ©s par lâentreprise Bouygues qui construit 3 775 logements de 1967 Ă 1971 3 479 logements collectifs Ă loyer modĂ©rĂ© dont 3 115 sur la commune de Grigny et 364 sur celle de Viry-ChĂątillon, 206 logements individuels et 90 habitations pour les Logements et Gestion immobiliĂšre de la RĂ©gion Parisienne LOGIREP6. En 1969, la petite commune de Grigny hĂ©rite dâune ville imposĂ©e dont elle nâa pas planifiĂ© la genĂšse et quâelle nâa pas les moyens dâentretenir7. En effet, Grigny ne bĂ©nĂ©ficie pas des effets de la TLE Taxe Locale dâĂquipement votĂ©e deux ans plus tĂŽt, et qui offre une aide financiĂšre aux communes en vue de la rĂ©alisation de structures et dâĂ©quipements induits par lâurbanisation. Cette situation se traduit trĂšs vite par un isolement de plus en plus accru de la citĂ©. CloisonnĂ©e par dâimportants axes routiers, et coupĂ©e du centre de la commune par lâA68, la Grande Borne manque cruellement dâĂ©quipements collectifs, dâinfrastructures et de moyens de transport. Au dĂ©but des annĂ©es 1980, les malfaçons du bĂąti viennent sâajouter aux dĂ©sagrĂ©ments liĂ©s Ă enclavement. En effet, lâisolation thermique et phonique des bĂątiments a fait les frais de la course aux bas prix, et les logements sont gangrenĂ©s par des dĂ©fauts de construction. Les immeubles ont Ă©tĂ© construits dans une logique qui a mis en avant le contrĂŽle des coĂ»ts de production, au dĂ©triment de la qualitĂ© du bĂąti. En 1982, sous la pression dâhabitants en colĂšre, plus de 750 logements de la citĂ© de la Grande Borne sont enfin dĂ©clarĂ©s insalubres et inaptes Ă ĂȘtre occupĂ©s9. Les malfaçons et la vĂ©tustĂ© prĂ©coce des bĂątiments seront aussi aggravĂ©es par les difficultĂ©s financiĂšres de la commune de Grigny et le manque de structures dâentretien. La citĂ© vit durement les effets de la crise Ă©conomique des annĂ©es 1970 qui accroĂźt la masse de familles pauvres et celles des Ă©trangers. Les classes moyennes françaises profitent des programmes gouvernementaux dâaccession Ă la propriĂ©tĂ©, et dĂšs le milieu des annĂ©es 1970, elles fuient en masse les HLMs afin de sâinstaller dans des pavillons. Ils sont progressivement remplacĂ©s par des immigrĂ©s venus des anciennes colonies françaises10. Le transfert de populations sâeffectue de plus en plus entre la Grande Borne et le grand ensemble voisin de Grigny 2 qui traverse aussi de fortes turbulences socio-Ă©conomiques. Cet Ă©change en vase clos renforce la prĂ©sence en masse de populations prĂ©caires. En 2013, le taux de couverture de la population de la Grande Borne par les Caisses dâAllocations Familiales sâĂ©levait Ă 70,5 % contre 43,8 % pour lâunitĂ© urbaine Paris11. Pour Alec Hargreaves, câest aussi Ă partir de ce moment de fuite des classes moyennes françaises que les zones pĂ©riphĂ©riques comme la Grande Borne deviennent progressivement synonymes dâaltĂ©ritĂ© ethnique Hargreaves, 2006 12. âââ- La Grande Borne dans lâimaginaire national En 1981, le traitement mĂ©diatique de lâĂ©tĂ© chaud des Minguettes consolide dans lâopinion publique lâidĂ©e dâun malaise des espaces urbains pĂ©riphĂ©riques. Dans son Ă©dition du 22 septembre 1981, le journal tĂ©lĂ©visĂ© dâAntenne 2 rĂ©vĂšle lâĂ©moi considĂ©rable gĂ©nĂ©rĂ© par ces premiĂšres Ă©meutes urbaines12. Câest une France sous le choc qui dĂ©couvre les images de vĂ©hicules en feu et le mal-ĂȘtre de toute une gĂ©nĂ©ration exprimĂ©e dans la violence et la destruction. ConstituĂ© en majoritĂ© dâenfants dits de la deuxiĂšme gĂ©nĂ©ration » de lâimmigration africaine et maghrĂ©bine, ce groupe subit de plein fouet lâimpact de la crise Ă©conomique des annĂ©es 1970 et la montĂ©e de la mĂ©fiance vis-Ă -vis des immigrĂ©s. Pendant quatre-vingt-treize jours, une partie de ces jeunes va sâengager dans une vĂ©ritable guĂ©rilla urbaine avec les forces de lâordre et dĂ©truire propriĂ©tĂ©s privĂ©es et symboles de lâĂtat dans la citĂ©. Le saccage des Ă©difices publics et des biens privĂ©s inscrit dans le paysage urbain les difficultĂ©s dâinsertion sociale et Ă©conomique. Lâampleur des destructions et la dĂ©couverte de centaines de carcasses de voitures brĂ»lĂ©es entĂ©rinent dans lâopinion publique lâexistence dâune peur des banlieues » Rey, 1996 44. Bien que les premiĂšres Ă©meutes de grande envergure ne touchent la Grande Borne quâen Septembre 2000, la citĂ© fait rĂ©guliĂšrement lâactualitĂ© pour la violence de ses groupes de jeunes, lâemprise des trafiquants de drogue, et les vagues de violence qui font fuir services publics et privĂ©s. AprĂšs les attentats des 7, 8 et 9 janvier 2015, la citĂ© opĂšre un retour exceptionnel sur la scĂšne nationale. Son nom est dĂ©sormais rĂ©guliĂšrement rattachĂ© Ă celui dâAmedy Coulibaly, originaire de la Place aux Herbes et auteur des tueries de Montrouge et de lâHyper Casher de la Porte de Vincennes. â Les mots des Grignois Face Ă lâhorreur des journĂ©es de janvier 2015 et la pression mĂ©diatique subie par les habitants de la citĂ©, deux collectifs vont se soulever afin dâagir sur la vision et les reprĂ©sentations de leur lieu de vie. Ălan Citoyen » est un groupe créé aux lendemains des attentats, afin de libĂ©rer la parole des Grignois et fournir un exutoire aux habitants profondĂ©ment choquĂ©s. Câest une association laĂŻque et sans attaches politiques, dont les membres, tous Grignois, sont dâorigines ethniques et dâappartenances religieuses diverses. Lâassociation regroupe des habitants, parents et citoyens de Grigny [qui refusent] la fatalitĂ© qui consisterait Ă condamner [leurs] enfants et [leurs] jeunes ». La premiĂšre action dâenvergure a Ă©tĂ© lâinstallation, les 3 et 7 fĂ©vrier 2015, de Murs de la parole », dâimmenses blocs de papiers installĂ©s devant les marchĂ©s et hypermarchĂ©s de la ville. Lâinitiative visait Ă dĂ©bloquer, Ă©couter et collecter la parole et les sentiments des Grignois face Ă lâatrocitĂ© des actes, mais aussi Ă interpeller lâopinion nationale sur les dangers des amalgames. Les murs furent vite remplis de mots qui tĂ©moignaient du dĂ©sir des habitants de libĂ©rer une parole coincĂ©e par la violence des actes, de partager leurs peurs face Ă la dĂ©rive de lâun des leurs, et de dire leur frustration devant la dĂ©ferlante mĂ©diatique. Ces mots montraient des Grignois, qui, Ă lâinstar de leurs concitoyens, Ă©taient traversĂ©s par la colĂšre, lâincomprĂ©hension, la peur et le dĂ©sir de se mobiliser contre lâhorreur et la dĂ©rive. Ălan Citoyen » a poursuivi cette premiĂšre initiative en installant des relais de paroles oĂč les habitants Ă©taient invitĂ©s Ă partager un mot, une pensĂ©e, un projet, de maniĂšre anonyme, ou autour dâune tasse de cafĂ©. Ces espaces de rencontre improvisĂ©s et dissĂ©minĂ©s dans la citĂ© permettaient aux habitants dâĂ©changer, de tisser un lien social qui sâĂ©tait lentement dĂ©litĂ©, tout en se rĂ©appropriant des portions de leur territoire. De par son appellation mĂȘme, Ălan Citoyen » sâinscrit dans le sillage dâun mouvement rĂ©publicain et dâun dĂ©sir de partager une Ă©motion collective avec le reste de la France. En ce sens, les mots recueillis rĂ©intĂšgrent Grigny et la Grande Borne dans le groupe national et sâĂ©rigent contre les reprĂ©sentations qui les peignent sous les traits de territoires perdus de la RĂ©publique. Les initiatives dâ Ălan Citoyen » ont Ă©tĂ© modestement relayĂ©es par la presse et les journaux tĂ©lĂ©visĂ©s nationaux, avec moins dâune dizaine dâarticles parus dans des quotidiens tels que Le Parisien ou Les Ăchos. Ă titre de comparaison, Ă la mi-janvier 2015, on trouve plus dâune centaine dâarticles dans des journaux de rĂ©fĂ©rence, en France et Ă lâĂ©tranger, sur la sĆur de Coulibaly et le studio de danses urbaines dont elle est propriĂ©taire. Ces choix Ă©ditoriaux expliquent sans doute ces mots laissĂ©s par un habitant sur lâun des espaces de paroles ouverts par Ălan Citoyen » Nous ne sommes pas responsables de ce quâun homme a fait. Ne venez pas ici chercher Coulibaly. Cherchez les Grignois, parlez-nous et vous saurez qui nous sommes ». Tout de mĂȘme, il est important de constater que malgrĂ© la faible couverture mĂ©diatique, lâĂ©vocation de cette initiative au niveau national participe dâun dĂ©but dâĂ©laboration dâun rĂ©cit qui prenne en compte les contributions et les voix des Grignois. Ces derniers ne sont plus seulement parlĂ©s », pour emprunter lâexpression de Bourdieu, mais deviennent acteurs et producteurs de lâinformation. Un article du Parisien consacrĂ© Ă lâinitiative parle de la volontĂ© des Grignois de se rĂ©approprier leur image ». Lâarticle reprend la bulle dâun habitant pour qui Ce sont toujours les mĂȘmes qui parlent de lâislam dans les mĂ©dias. On veut sâexprimer mais il nâ y a pas la possibilitĂ©. Quâon nous ouvre les outils de la RĂ©publique ! ». Dans sa livraison du 12 fĂ©vrier 2015, Le RĂ©publicain titre sur le dĂ©sir des habitants de ne plus subir le flot mĂ©diatique ». Les habitants interrogĂ©s sây insurgent contre les reprĂ©sentations externes et souhaitent montrer leurs villes sous toutes leurs facettes, des plus sombres aux plus positives. Le travail de lâassociation a eu un Ă©norme Ă©cho dans les mĂ©dias associatifs et municipaux dans lâEssonne et le reste de la rĂ©gion parisienne. Lâanalyse de paroles glanĂ©es montrent lâimpact thĂ©rapeutique de cette initiative pour les Grignois et les habitants de la Grande Borne Au dĂ©but, je ne voulais pas en parler. Jâavais honte que mon quartier soit encore associĂ© au mal. Des journalistes sont venus du monde entier pour nous voir comme si nous Ă©tions des monstres. Je suis fiĂšre de voir les gens de mon quartier unis et ensemble pour dire non au mal. Ăa montre au reste de la France que nous souffrons avec eux ». Les feuilles noircies disent aussi lâattachement viscĂ©ral Ă la citĂ© et le quotidien de la vie Ă la Grande Borne, comme dans un effort de contrebalancer le traitement mĂ©diatique Ă charge de la ville. Les organisateurs dâ Ălan Citoyen » ont Ă©tĂ© dĂ©passĂ©s par lâengouement populaire autour de leur initiative, par la diversitĂ© dâĂąge et dâorigine des personnes venues apposer un dessin, un mot ou une phrase sur les espaces de paroles ouverts. Lâassociation travaille actuellement en Ă©troite collaboration avec des sociologues afin dâassurer la pĂ©rennitĂ© de son action sur le terrain. La seconde action importante est celle de Reporter Citoyen » qui sâest engagĂ© Ă replacer les Grignois au centre de la production dâinformations sur leur environnement. Reporter Citoyen » est une initiative supportĂ©e par la plateforme indĂ©pendante et associative LaTĂ©lĂ©Libre et lâĂcole des MĂ©tiers de lâInformation de Paris. Elle ouvre les portes des mĂ©tiers de journalisme Ă des jeunes issus des quartiers sensibles dâĂle-de-France en leur offrant gratuitement une formation de trois ans. Le 17 janvier 2015, de jeunes reporters publient un manifeste accompagnĂ© dâune tribune vidĂ©o intitulĂ©e Nous Reporters Citoyens Refusons les PrĂ©jugĂ©s »13. Dans la vidĂ©o, huit Ă©tudiants originaires de Grigny, mais aussi de Viry-ChĂątillon, CrĂ©teil, Saint-Denis et lâĂle-Saint-Denis apportent une rĂ©ponse en trois parties Ă un article du quotidien Le Figaro paru le 15 janvier 2015 intitulĂ© Ă Grigny, la ville de Coulibaly, la thĂ©orie du complot va bon train ». Dans la premiĂšre partie, ils sâinsurgent contre les amalgames dont ils sâestiment victimes, en refusant par exemple dâĂȘtre comparĂ©s Ă des herbes folles condamnĂ©es Ă devenir de mauvaises graines », que lâon prenne la parole de quelques jeunes collĂ©giens immatures pour lâopinion de tous » ou encore que les journalistes viennent dans [leur] quartier comme au zoo, pour voir des animaux ». Dans le seconde partie, ils demandent Ă ĂȘtre respectĂ©s en tant que citoyens, Français et ĂȘtres humains », que lâĂtat reconnaisse ses erreurs et prenne ses responsabilitĂ©s » ou encore que la presse traite et relaie de maniĂšre Ă©quitable lâinformation ». Enfin dans la troisiĂšme partie, les jeunes reporters citoyens se dĂ©clarent solidaires de toutes les victimes », de toutes les familles en deuil » et de toutes les actions qui favorisent le vivre ensemble ». Pour ces futurs journalistes aux origines ethniques diverses, lâhorreur des actions dâAmedy Coulibaly braque les projecteurs de la presse nationale et mondiale sur toute une ville, au risque de ne mettre en lumiĂšre que les comportements radicaux. Dans leur tribune, ils sâinsurgent contre la vision tronquĂ©e de Grigny et des banlieues en gĂ©nĂ©ral. Ils condamnent fermement la barbarie de janvier 2015, en affirmant, lâun aprĂšs lâautre, puis dâune mĂȘme voix leur attachement Ă la paix, Ă la RĂ©publique et Ă ses valeurs. Ces intervenants offrent un regard neuf sur le signe que reprĂ©sente le jeune de banlieue ». PopularisĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1990 par des journalistes du quotidien Le Monde, le terme est vite repris dans les analyses sociales et politiques de la banlieue. Il renvoie aujourdâhui Ă une image fixe, celle dâun individu en rupture avec la sociĂ©tĂ© ĂągĂ© de moins de 25 ans, il est facilement reconnaissable Ă sa piĂštre maĂźtrise du français, Ă son Ă©ternelle tenue de sport et Ă sa casquette vissĂ©e Ă lâenvers. Dans Portrait du dĂ©colonisĂ© arabo-musulman et quelques autres » paru en 2004, Albert Memmi met en Ă©vidence la confusion sĂ©mantique qui sâest installĂ©e entre jeune » et enfant dâimmigrĂ© » Jeunes MaghrĂ©bins » ne valait guĂšre mieux, câĂ©tait encore dâune certaine maniĂšre une exclusion, une insistance sur la diffĂ©rence ; câest pourquoi on rĂ©duisit les enfants dâimmigrĂ©s Ă lâadjectif jeunes, en rĂ©fĂ©rence seulement Ă leur Ăąge, mĂȘme sâil sâagissait dâune jeunesse particuliĂšre, qui ne rĂ©pondait pas aux critĂšres, aux prĂ©occupations Ă lâavenir des autres jeunes. Memmi, 2004 137 VulgarisĂ© par les discours publics, le terme jeune » est aujourdâhui devenu synonyme de Français issus de lâimmigration ». En dĂ©cembre 2010, la secrĂ©taire dâĂtat Ă la Famille Nadine Morano met ce phĂ©nomĂšne en relief lors dâun dĂ©bat local sur lâidentitĂ© nationale. InterrogĂ©e sur la jeunesse de banlieue, elle dĂ©clare Moi, ce que je veux du jeune musulman, quand il est Français, câest quâil aime son pays, câest quâil trouve un travail, câest quâil ne parle pas le verlan, quâil ne mette pas sa casquette Ă lâenvers »14. Outre le raccourci hĂątif Ă©tabli ici entre jeune de banlieue » et jeune musulman », il est intĂ©ressant de noter que la seule Ă©vocation dâun mot en apparence anodine suffit Ă invoquer les fantasmes les plus divers, de la menace que constitue la rupture sociale dâune frange de la population Ă la peur de lâinvasion religieuse. Pour le sociologue Francis Truong, cette rhĂ©torique nâest pas sans consĂ©quence car Parler du jeune de banlieue revient Ă enfermer une jeunesse plurielle sous un stigmate unique [âŠ] la rĂ©duisant Ă lâimage de la racaille incivile ou Ă celle de la victime sociale. Condamnables ou excusable »15. Les membres de Reporter Citoyen » se rĂ©approprient ce terme et lâarriment fermement au centre de leur activitĂ© journalistique. En associant cette expression Ă leur ancrage Ă la RĂ©publique, Ă leur attachement Ă la justice et Ă lâĂ©quitĂ© des reprĂ©sentations, ils dĂ©voilent le large Ă©ventail de personnages qui peuplent lâespace des banlieues, et Ă©branlent la figure symbolique dâune jeunesse uniforme Ă la dĂ©rive. Cette initiative a Ă©tĂ© largement relayĂ©e par la presse française et internationale, et il est Ă noter que ce groupe est dĂ©sormais trĂšs sollicitĂ© par les politiques dans la recherche dâune solution commune Ă la situation actuelle de Grigny et des zones pĂ©riphĂ©riques sensibles. Aujourdâhui, force est de constater que la banlieue est plus connue Ă travers le discours des mĂ©dias et celui des Ă©diles politiques quâĂ travers les productions de ses habitants. Ces discours forgĂ©s de lâextĂ©rieur ont pour consĂ©quence la crĂ©ation dans lâinconscient collectif dâimages qui dĂ©passent et effacent la rĂ©alitĂ© de la pĂ©riphĂ©rie. En analysant la fabrique de ces images, Pierre Bourdieu constate en 1993 Parler aujourdâhui de banlieues Ă problĂšmes ou de ghetto, câest Ă©voquer, presque automatiquement, non des rĂ©alitĂ©s dâailleurs trĂšs largement inconnues de ceux qui en parlent le plus volontiers, mais des fantasmes, nourris dâexpĂ©riences Ă©motionnelles suscitĂ©es par des mots ou des images plus ou moins incontrĂŽlĂ©es, comme ceux que vĂ©hiculent la presse Ă sensation et la propagande ou la rumeur politique. » Bourdieu, 1993 249. Bourdieu parle ainsi dâ effets de lieu » afin dâillustrer les associations qui se mettent en place entre territoires, discours et fantasmes. Ăcrivain et Ă©ducateur social, Ătienne Liebig lui emboĂźte le pas lorsquâil dĂ©clare quâon en arrive Ă ne plus observer objectivement le rĂ©el, mais Ă interprĂ©ter selon une grille fantasmĂ©e les comportements des habitants des quartiers, consolidant encore le mur invisible qui sĂ©pare les banlieues du reste du pays » Liebig, 2010 2. Selon Liebig, les banlieues se sont durablement installĂ©es dans lâimaginaire collectif comme un lieu exotique, une zone de relĂ©gation et la quintessence du mal. Tout y possible, tout peut sây faire » Liebig, 2010 2. Pour la sociologue Marilla Amorim, parler de la banlieue revient implicitement Ă Ă©voquer la ville, de la mĂȘme maniĂšre quâutiliser le terme pĂ©riphĂ©rie » Ă©voque lâexistence dâun centre » Amorim, 2002 24. Cette position laisse apparaĂźtre les liens et oppositions qui peuvent exister entre ces diffĂ©rents territoires villes et pĂ©riphĂ©ries et informent la mise en place de leur construction discursive. Espaces et discours sont indissociables et pour la gĂ©ographe MĂ©lina Germes, lâespace est constituĂ© par les discours en ce que les significations dâun espace ou dâun lieu sont Ă©laborĂ©es, discutĂ©es, façonnĂ©es par les diffĂ©rents discours » Germes 2012 517. En France, le discours sur la ville est fortement marquĂ© depuis plus dâune dĂ©cennie par la question des espaces pĂ©riphĂ©riques qui sont devenus des lieux de la marginalitĂ©, des champs de la sauvagerie moderne, [âŠ] lieux des incivilitĂ©s, de la solitude et des inĂ©galitĂ©s les plus criantes » Dubet, 1995 52. La banlieue est le rĂ©sultat de planifications architecturales et politiques, mais aussi le fruit de perceptions et de projections qui vont cristalliser dans lâopinion publique lâidĂ©e de zones de non-droit et de relĂ©gation. En rĂ©action Ă ces discours qui disent ce territoire du dehors, des mouvements tels que Collectif Ălan Citoyen » et Reporter Citoyen » se fixent comme double objectif de dire leur territoire dans sa banalitĂ© et de dĂ©montrer lâattachement de ces habitants Ă une identitĂ© française multiple. LâĂ©criture substitue ainsi habilement la peinture du quotidien aux reprĂ©sentations et Ă lâexceptionnalitĂ© des Ă©vĂ©nements. Perec attire notre attention sur le paradoxe dâun quotidien qui devient opaque Ă force dâĂȘtre trop Ă©vident Ce que nous appelons quotidiennetĂ© nâest pas Ă©vidence, mais opacitĂ©, une forme de cĂ©citĂ©, une maniĂšre dâanesthĂ©sie » Perec, 1974 IVe de couverture. Dans le cas de la banlieue, cette rĂ©flexion prend un double sens qui Ă©claire lâentreprise de ces deux collectifs. Perec dĂ©nonce la cĂ©citĂ© dans laquelle nous plongent les automatismes et lâĂ©ternelle rĂ©pĂ©tition des Ă©vĂ©nements. Pour le sociologue, seule lâĂ©criture et lâinterrogation de ces habitudes sont Ă mĂȘmes de venir Ă bout de lâopacitĂ© de lâhabitude. Ce parallĂšle est extrĂȘmement saillant pour la banlieue en ce sens que cet espace est enfermĂ© dans des prĂ©conceptions que lâon peut comparer aux automatismes perequiens. LâĂ©criture du quotidien de la banlieue apparaĂźt comme une alternative saine afin de lever le voile qui sâest abattu sur la pĂ©riphĂ©rie. Les voix et actions de ces Grignois sont autant dâencouragements Ă ne plus penser lâidentitĂ© et le territoire en termes de catĂ©gories fixes. Le chemin de la rĂ©habilitation est encore long. Il passe par les efforts de renouveau urbain, la prise en compte des erreurs du passĂ© et lâimpĂ©ratif du vivre ensemble », mais aussi par un changement des reprĂ©sentations dans et en dehors de la citĂ©. En ce sens, les actions de Reporter Citoyen » et Ălan Citoyen » sont exemplaires. Mame-Fatou Niang âââ Mame-Fatou Niang enseigne la littĂ©rature française et francophone Ă Carnegie Mellon University Pittsburgh, USA. Mame-Fatou Niang sâintĂ©resse aux questions urbaines dans la littĂ©rature française contemporaine, ainsi quâĂ lâĂ©tude de la diaspora noire en Europe. Elle a rĂ©cemment publiĂ© MĂšres migrantes et filles de la RĂ©publique IdentitĂ© et FĂ©minitĂ© dans le roman de banlieue », in HervĂ© Tchumkam Dir., La France face Ă ses Banlieues, PrĂ©sence Francophone 80 2013 p. 60-84 ; et UrbanitĂ©s FĂ©minines dans le roman CaribĂ©en », in Gladys M. Francis Dir., Amour et genre dans la littĂ©rature franco-caribĂ©enne, Vents AlizĂ©s Ă paraĂźtre 2015. mniang AT DOT edu â Couverture La citĂ© de la Grande Borne, Grigny Niang, 2015 ââ Bibliographie Aillaud E., 1968, Tribune Libre Quâest-ce quâune ville ?, Paris, Cahiers de lâIAURP, 11 p. Aillaud E., 1972, La Grande Borne Ă Grigny [Une ville, essai de rĂ©ponse], Paris, Ăditions Hachette, 189 p. Amorim M., 2002. La ville comme un autre et lâautre de la ville », in Amorim M. Dir., Images et discours sur la banlieue, Paris, Eres, pp. 43-69. Bourdieu P., 1998. Effets de Lieu », in Bourdieu P. Dir., La MisĂšre du Monde, Paris, Ăditions du Seuil, pp. 249-250. Dubet F., 1995. 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[â©]Pernoud G. et Van Der Gucht G., La France dĂ©figurĂ©e, Office National de Radiodiffusion TĂ©lĂ©vision Française, 10 DĂ©cembre 1972, TĂ©lĂ©vision, [â©] Bien que la banlieue dĂ©signe tout espace situĂ© Ă la pĂ©riphĂ©rie dâune ville, le sens de ce terme a beaucoup Ă©voluĂ©. Aujourdâhui, il dĂ©signe aussi une rĂ©alitĂ© sociale, Ă©conomique et mentale qui exclut par exemple les banlieues chics de Paris, Lyon ou Bordeaux que sont Neuilly, Ăcully ou CaudĂ©ran. Son Ă©vocation mobilise presque instantanĂ©ment un rĂ©seau de fantasmes et de reprĂ©sentations nĂ©gatives. Le terme mythologie urbaine » fait rĂ©fĂ©rence Ă lâensemble des reprĂ©sentations mentales qui se sont dĂ©veloppĂ©es autour des banlieues, et plus spĂ©cifiquement, autour du type dâhabitat urbain social dĂ©labrĂ© occupĂ© par des populations en grande prĂ©caritĂ© Ă©conomique et composĂ©e, pour une part importante, dâimmigrĂ©s ou de Français dâorigine Ă©trangĂšre. [â©]Archives dĂ©partementales de lâEssonne [â©]VidĂ©o disponible Ă lâadresse [â©] [â©]Ces villes imposĂ©es seront aussi implantĂ©es dans les communes dâOrsay le complexe des Ulis, de Viry-ChĂątillon la citĂ© de la Cilof ou de Vigneux-sur-Seine La Croix Blanche. MalgrĂ© les nombreux refus des communes, la construction est autorisĂ©e par la puissante DGEN Direction GĂ©nĂ©ral Ă lâĂquipement National grĂące Ă qui lâĂtat se substitue aux villes en matiĂšre dâurbanisme. [â©]En 2002, un pont est construit sur lâA6 et relie enfin la citĂ© au centre de la commune de Grigny. [â©]Maison de Banlieue et de lâArchitecture. Conseil dâArchitecture, dâUrbanisme et dâEnvironnement de lâEssonne. Centre de Ressources Politique de la Ville en Essonne. Cahier N° 11 de la Maison de Banlieue et de lâArchitecture. mi-dĂ©cembre 2005. [â©]Dans les vingt annĂ©es qui suivent lâimplantation des HLM, la banlieue se caractĂ©rise de plus en plus par un fort marquage immigrĂ©. En 1985, plus de 60 % des 65 000 habitants de la commune des Minguettes Ă Lyon Ă©tait dâorigine Ă©trangĂšre, et prĂšs de 55 nationalitĂ©s diffĂ©rentes se cĂŽtoyaient dans lâespace de la citĂ© Hargreaves, 2006 12. Ă la Grande Borne, lâimmigration participe considĂ©rablement Ă la croissance dĂ©mographique puisque 23,5 % de la population Ă©tait originaire de lâĂ©tranger en 1999. Il est possible de consulter tous ces chiffres sur le site du SystĂšme dâinformation gĂ©ographique de la politique de la ville [â©]Sources Caisse Nationale dâAllocations Familiales 2011 â Iris, INSEE 2010 â Iris, Caisse Nationale dâAllocations Familiales 2011 â Commune, INSEE 2010 â Commune, Caisse Nationale dâAllocations Familiales 2011 â UnitĂ© urbaine, INSEE 2010 â UnitĂ© urbaine [â©] [â©]La tribune sera aussi publiĂ©e dans Le Monde du 16 janvier 2015. [â©]Discours prononcĂ© le 14 DĂ©cembre 2010 Ă Charmes Vosges. LâintĂ©gralitĂ© de lâintervention est disponible ici [â©]Fabien Truong, Le jeune de banlieue nâexiste pas. » LibĂ©ration. [Paris] 11 Avr. 2010. [â©] HJExpjf.